LA CONNAISSANCE TRANSCENDANTALE
Samjaya dit : Le Seigneur Kŗşna prononça
ces paroles à Arjuna ayant les yeux affligés et pleins de larmes, envahit de
compassion et de désespoir. (2.01)
Le Suprême Seigneur dit : Comment un tel
découragement a-t-il pu s’emparer de toi en ce moment ? Ce n’est pas
convenable pour un Aryen (ou une personne dont le mental et les actions sont
nobles). C’est déshonorant, et ne conduit pas une personne au ciel, O Arjuna.
(2.02)
Ne te laisse pas aller à la couardise, O Arjuna, car cela
ne te convient pas. Chasse cette faiblesse insignifiante de ton cœur et
lèves-toi pour le combat, O Arjuna. (2.03)
ARJUNA
CONTINUE SON RAISONNEMENT CONTRE LA GUERRE
Arjuna dit : Comment pourrais-je dans le combat
lancer des flèches à Bhīşma et Drona, qui sont dignes de ma vénération,
O Kŗşna ? (2.04)
Vraiment, mieux voudrait vivre dans ce monde d’aumône
plutôt que d’abattre ces nobles gourous, car en les tuant je ferais que
profiter des richesses et plaisirs souillées de sang. (2.05)
Nous ne connaissons pas quel alternatif soit mieux pour
nous, combattre ou quitter. D’ailleurs, nous ne savons pas si nous allons
conquérir ou qu’ils nous conquérront. Nous ne devrions pas, ne fus que
souhaiter, de vivre après avoir tué les fils de Dhrtarâstra qui sont dressés devant nous. (2.06)
Mes sens sont
envahis par la faiblesse de la pitié, et mon mental est confus quant au devoir
(Dharma). Je Te demande de me dire en toute certitude qu’elle est la meilleure.
Je suis Ton disciple. Instruis-moi, qui aie trouvé refuge en toi. (2.07)
Je ne vois pas
qu’acquérir un royaume sans rival et prospère sur cette terre, ou même la
seigneurie sur les régnants célestes (Devas) dissiperaient la douleur qui
dessèche mes sens. (2.08)
Samjaya
dit : O Roi, après avoir parlé ainsi au Seigneur Kŗşna, le puissant
Arjuna dit à Kŗşna : je ne combattrai pas, et il resta
silencieux. (2.09)
O Roi, le Seigneur Kŗşna, esquissant un
sourire, dit ces paroles à Arjuna découragé au milieu des deux armées. (2.10)
LES
ENSEIGNEMENTS DE LA GÎTÂ DÉBUTE PAR LA VRAIE CONNAISSANCE DU SOI ET DU CORPS
PHYSIQUE
Le Seigneur Suprême dit : Tu pleures pour ceux qui ne
sont pas dignes d’être lamentés, et pourtant tu prononces des paroles de
sagesse. Le sage ne se lamente ni pour les vivants ni pour les morts. (2.11)
Il n’y eut
jamais un temps que ces monarques, toi, ou moi cessèrent d’exister, et nous ne
pourrons jamais cesser d’exister dans l’avenir. (2.12)
Tout comme l’entité vivante (Atmâ, Jîva, Jîvâtma) acquiert
l’enfance, un corps jeune, et un corps de vieillesse durant cette vie ; de
même elle acquiert un autre corps après la mort. Le sage n’en est pas troublé.
(Voir aussi 5.08) (2.13)
Les contacts des
sens vers les objets appropriés engendrent la chaleur et le froid, la douleur
et le plaisir. Ils sont transitoires et impermanents. Ainsi, apprends à les
endurer, O Arjuna. (2.14)
Car une personne
calme – qui n’est pas affectée par ces sensations, et est ferme dans la douleur
et le plaisir, se rend digne de l’immortalité, O Arjuna. (2.15)
LE SOI
EST ETERNEL, LE CORPS EST TRANSITOIRE
L’Esprit invisible (Sat, Atmâ) est éternel, et le monde
visible (y compris le corps physique) est transitoire. La réalité de ces deux
est vraiment perçue par les voyants de la vérité. (2.16)
L’Esprit (Atmâ) par qui tout cet univers est pénétré, est
indestructible. Personne ne sait détruire l’impérissable Esprit. (2.17)
Les corps de l’éternel, immuable, et incompréhensible Esprit
sont périssables. Par conséquent, livre bataille, O Arjuna. (2.18)
Celui qui pense qu’Atmâ (Esprit) peut tuer, et celui qui
pense qu’Atmâ est tué, les deux sont ignorants. Parce qu’Atmâ ne tue ou est
tué. (Un verset parallèle se trouve dans KaU 2.19) (2.19)
L’Esprit (Atmâ) ne naît jamais et ne
meurt jamais en aucun temps. Il ne commence pas d'être, ou ne cesse pas
d’exister. Il est ingénéré, éternel, permanent, et ancien. L’Esprit n’est pas
détruit lorsque le corps est détruit. (Voir aussi KaU 2.18) (2.20)
O Arjuna, comment une personne qui sait que l’Esprit
(Atmâ) est indestructible, éternel, ingénéré, et immuable, tue quelqu’un ou
provoque quelqu’un d’être tué ? (2.21)
LA
MORT ET LA TRANSMIGRATION DE L’ÂME
Tout comme un homme revêt des vêtements neufs après avoir
laissé les anciens ; de même, l’entité vivante (Atmâ, Jîva, Jîvâtma)
acquiert de nouveaux corps après avoir rejeté les vieux corps. (2.22)
Les armes ne peuvent pourfendre cet Esprit (Atmâ), le feu
ne le brûle pas, l’eau ne le mouille pas, et le vent ne le dessèche. L’Atmâ ne
peut être coupé, brûlé, mouillé, ni asséché.
Il est éternel, omniprésent, inchangé, immuable, et ancien. (2.23-24)
L’esprit (Atmâ, le Soi) est dit être inexplicable,
incompréhensible, et immuable. Connaissant cet Esprit comme tel, tu ne devrais
pas t’affliger. (2.25)
Bien que tu penses que cette entité vivante ou corps
prend naissance et meurt perpétuellement, même alors, O Arjuna, tu ne devrais
pas t’affliger ainsi. Car la mort est certaine pour ce qui est né, et la naissance
est certaine pour ce qui meurt. Par conséquent, tu ne devrais pas te lamenter
sur l’inévitable. (2.26-27)
Tous les êtres, O Arjuna, sont non
manifestés – invisibles aux yeux physiques – avant la naissance et après la
mort. Ils se manifestent seulement entre la naissance et la mort. Y a-t-il là
de quoi s’affliger ? (2.28)
L’ESPRIT
INDESTRUCTIBLE TRANSCENDE LE MENTAL ET LA PAROLE
Certains voient l’Esprit comme une merveille, d’autres le
décrivent comme merveilleux, d’autres entendent parler de lui comme d’une
merveille. Même après avoir entendu le concernant, peu de gens le connaît. (Voir aussi KaU 2.07) (2.29)
O Arjuna, l’Esprit qui demeure dans le corps de tous les
êtres est éternellement indestructible. Par conséquent, tu ne devrais pas
pleurer pour personne. (2.30)
LE
SEIGNEUR KŖŞNA RAPPELLE ARJUNA DE SON DEVOIR COMME GUERRIER
Ayant égard à ton propre devoir en tant que guerrier, tu
ne devrais pas être indécis. Car, il n’y a rien de plus heureux pour un
guerrier qu’une guerre juste. (2.31)
Seulement les guerriers favorisés, O Arjuna, reçoivent
l’opportunité d’une telle guerre non préméditée, qui est comme une porte
ouverte vers le ciel. (2.32)
Si tu ne veux pas combattre cette guerre juste, alors tu
manqueras à ton devoir, tu perdras ta réputation, et tu t’affligeras le péché.
(2.33)
Les hommes raconteront perpétuellement ta disgrâce. Pour
les honorables, le déshonneur est pire que la mort. (2.34)
Les grands guerriers penseront que tu t’es retiré de la
bataille par crainte. Ceux qui t’on hautement estimés, perdront leur respect
pour toi. (2.35)
Tes ennemis prononceront beaucoup de paroles injurieuses
et mépriseront ta capacité. Que peut-il y avoir de plus douloureux ? (2.36)
Tu iras au ciel si tué au combat (répondant au devoir),
ou victorieux tu jouiras du royaume terrestre. Par conséquent, debout donc,
décidé à combattre, O Arjuna. (2.37)
Considérant le plaisir et la
souffrance, le gain et la perte, la victoire et la défaite de la même façon,
engage-toi dans ton devoir. En accomplissant ton devoir, tu ne commettras pas
de péché. (2.38)
LE
SCIENCE DE KARMA-YOGA, L’ACTION D’DÉSINTÉRESSÉE
La sagesse de la connaissance transcendantale t’a été
transmise, O Arjuna. Maintenant écoute la sagesse de Karma-yoga, le service
désintéressé (Sevā), car en y étant pénétré tu seras libéré des chaînes de
l’action (Karma). (2.39)
Dans le Karma-yoga aucun effort n’est jamais perdu et il
n’y a pas d’effet adverse. Même la moindre pratique de cette discipline protège
l’homme de la grande peur de la naissance et de la mort. (2.40)
Un Karma-yogi tient une détermination résolue vers la
réalisation de Dieu, O Arjuna, mais les désires sont innombrables et diverses
de l’homme qui travaille pour jouir des fruits de son activité. (2.41)
LES
VEDAS TRAITENT L’ASPECT MATÉRIEL ET SPIRITUEL DE LA VIE
Les mal guidé prend plaisir dans le chant mélodieux de la
Véda – sans comprendre le vrai objectif des Védas – réfléchit, O Arjuna, comme
si il n’y a rien d’autre dans les Védas que des rituelles avec la seule raison
d’obtenir les jouissances célestes.
(2.42)
Ils sont dominés par les désirs matériels, et considèrent
l’acquisition céleste comme étant le but le plus élevé de la vie. Ils
s’engagent dans des rites spécifiques pour cause de prospérité et de
jouissance. La renaissance est le résultat de leurs actions. (Voir aussi KaU
2.05, IsU 09) (2.43)
La détermination résolue de la réalisation du Soi n’est
pas formée dans le mental de ceux qui sont attachés aux plaisirs et au pouvoir,
dont le jugement est obscurci par ces activités ritualistes. (2.44)
Une partie des Vedas traite les trois modes ou états
(Gunas) de la Nature matérielle. Libère-toi des paires d’opposés, restes
toujours équilibré et indifférent à toutes pensées d’acquisition et de préservation.
Lève-toi au-dessus des trois états, en pleine conscience, O Arjuna. (2.45)
Pour la personne dont le Soi est réalisé les Védas sont
aussi utiles qu’un petit réservoir d’eau lorsque l’eau d’un énorme lac devient
disponible. (2.46)
THÉORIE
ET PRATIQUE DU KARMA-YOGA
Tu as Adhikāra (droit, privilège)
simplement sur tes devoirs respectifs, mais pas de contrôle ou de revendication
sur les résultats. Les fruits du travail ne peuvent pas être ton motif. Tu ne
devrais jamais être inactif. (2.47)
Accomplis ton devoir le mieux possible,
O Arjuna, par ton mental attaché au Seigneur, abandonnant le souci et
l’attachement intéressé aux résultats, et reste calme dans le succès et
l’échec. L’équanimité du mental est appelée Karma-yoga. (2.48)
Le travail accompli par des motifs égoïstes est très
inférieur au service désintéressé ou le Karma-yoga. C’est pourquoi sois un
Karma-yogi, O Arjuna. Ceux qui travaillent pour jouir des fruits de leur labeur
sont vraiment malheureux. (Car l’homme n’a pas de contrôle sur les résultats).
(2.49)
Un Karma-yogi devient dans cette vie
même libéré du vice autant que de la vertu. S’efforcer de travailler le mieux
possible sans être attaché aux fruits du travail est appelé Karma-yoga. (2.50)
Les Sages Karma-yogis sont libérés des chaînes de la
renaissance en renonçant à l’attachement intéressé aux fruits de tout travail,
pour atteindre ainsi l’état de béatitude divine. (2.51)
Lorsque ton intellect aura complètement franchi le voile
de confusion, alors tu deviendras indifférent aux Écritures que tu connais et à
celles qu’il te reste à connaître. (2.52)
Lorsque ton intellect, rendu confus par les opinions
contradictoires et la doctrine ritualiste des Vedas, restera ferme et
inébranlable dans la concentration sur le Suprême Être, ainsi tu atteindras
l’union avec le Suprême Être en état d’extase (Samādhi). (2.53)
Arjuna dit : O Kŗşna, quelles sont les
marques d’une personne illuminée (Sthita-prajna)
dont l’intellect est ferme ? Quelle est la façon de parler d’une personne
dotée d’un intellect stable ? Comment une telle personne s’assied et
marche ? (2.54)
LES
MARQUES D’UNE PERSONNE QUI S’EST RÉALISÉE
Le Seigneur Suprême dit : Lorsqu’un être est
complètement libre de tous désirs du mental et est satisfait avec l’Éternel Être
(Brahma) par la joie de l’Éternel Être, ainsi cet homme est appelé un illuminé
(Sthita-prajna), O Arjuna. (2.55)
Une personne dont le mental est
impassible au chagrin, qui ne sollicite pas les plaisirs, et qui est
complètement libérée de l’attachement, de la peur, et de la colère, est appelée
Sthita-prajna – un sage d’un intellect ferme. (2.56)
Ceux qui n’ont aucun attachement ; qui ne sont pas
transportés dans l’obtention des résultats désirés, ni troublés par des
résultats inopportuns ; leur intellect est considéré comme fermement
établi. (2.57)
Lorsque quelqu’un retire complètement ses sens des objets
de perception comme une tortue retire ses membres dans sa carapace pour se
protéger, alors l’intellect d’une personne est considéré comme fermement établi.
(2.58)
Le désir pour les plaisirs sensuels s’évade lorsque
l’homme s’abstient de jouissance sensuelle, bien que le goût envers la
jouissance sensuelle subsiste. Cette envie disparaît aussi chez la personne qui
a connu le Suprême Être. (2.59)
LE
DANGER DES SENS NON RESTREINTS
Les sens sans repos, O Arjuna,
emportent fortement le mental, même d’une personne sage s’efforçant vers la perfection.
(2.60)
L’homme devrait fixer son mental sur
Moi dans une douce contemplation, après avoir mis les sens sous contrôle. Son
intellect devient fermement établi, lorsque ses sens se trouvent complètement
maîtrisés. (2.61)
L’homme développe l’attachement aux
objets des sens, en pensant à ces objets de sens. Le désir envers les objets de
sens vient de l’attachement aux objets de sens, et la colère vient des désirs
inaccomplis. (2.62)
L’illusion ou les idées sauvages parviennent de la
colère. Le mental est désorienté par l’illusion. Le raisonnement est détruit
lorsque le mental est désorienté. L’homme s’égare du droit chemin lorsque le
raisonnement est détruit. (2.63)
L’OBTENTION
DE LA PAIX ET DU BONHEUR PAR LE CONTRÔLE DES SENS ET DE LA CONNAISSANCE
Une personne disciplinée, se mouvant parmi les objets des
sens sous contrôle et libérée de tout attachement et de toute aversion, atteint
la tranquillité. (2.64)
Toutes les souffrances sont détruites en atteignant la
tranquillité. L’intellect d’une telle personne tranquille devient vite
complètement ferme et unie à l’Éternel Être (Brahma). (2.65)
Il n’y a pas de connaissance du Soi, ni de perception du
Soi chez ceux qui ne sont pas unis à l’Éternel Être (Brahma). Sans la
perception du Soi il n’y pas de paix, et sans paix il n’y a pas de bonheur.
(2.66)
Le mental, lorsque contrôlé par les
sens vagabonds, emporte l’intellect comme la tempête qui dérive un vaisseau en
mer de sa destination – le rivage spirituel. (2.67)
Par conséquent, O Arjuna, l’intellect d’une personne
devient ferme lorsque les sens sont complètement retirés des objets des sens.
(2.68)
Le yogi, la personne modérée, se tient éveillé lorsqu’il
fait nuit pour les autres. Il fait nuit pour le yogi lorsqu’il voit tous les
autres éveillés. (2.69)
L’homme atteint la paix intérieure don
le mental a dissipé tous les désirs sans créer moindre perturbation mental,
comme l’eau d’une rivière qui se déverse en plein océan sans le perturbé. Celui
qui désire les objets matériels ne trouve jamais la paix. (2.70)
Celui qui abandonne tous désirs, et devient libéré de
tout aspiration et d’émotion quant au « je » et « moi »,
atteint la paix. (2.71)
O Arjuna, ceci est l’état superconscient
(Brāhmā). Atteignant cet état,
l’homme n’est plus abusé. Une fois parvenu dans cet état, même à la fin de la
vie, la personne atteint Brahma-nirvāna (ou, devient un avec l’absolu).
(2.72)
Ainsi prend fin le deuxième chapitre intitulé «La Connaissance Transcendantale » dans les
Upanişad de la Bhagavadgītā, l’écriture de yoga, touchant la
science de l’Absolu dans la forme du dialogue entre Srīkŗşna et
Arjuna.
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